mercredi 19 juin 2013

LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS FACE AUX PAYS D'ORIGINE : ETAT DE L'ART

L’environnement économique mondial a changé. La mondialisation des marchés a des conséquences directes sur le comportement des consommateurs qui doivent se décider face à un choix de produits de différentes origines et un nombre accru de marques. Cette tendance affecte la plupart des secteurs industriels et les conséquences de ces pratiques touchent directement le consommateur dans son processus d’évaluation et de choix.
Cette partie est dédiée à la présentation du cadre théorique du mémoire. Il s'agit d'une synthèse réalisée sur quelques travaux menés sur l'effet "pays d'origine" dans les évaluations des consommateurs et leurs actes d'achat par de Keillor et al. (2001), Koschate-Fischern, Diamentopoulos et Oldenkotte (2012), Liefeld (2004), Netemeyer, Durvasula et Lichtenstein (1991), Shimp et Sharma (1987), Suh et Smith (2008),  et Usunier (2002). Ce sujet a fait l'objet de nombreuses recherches depuis plus de quarante ans ce qui a pour conséquence de donner un champ théorique d'investigation très vaste. Il englobe aussi des études réalisées sur l'ethnocentrisme du consommateur et son degré de préférence nationale.
Cette partie est articulée en 4 chapitres :
- l'historique des recherches sur l'effet "pays d'origine" en marketing ;
- les processus d'influence de l'image du pays d'origine à travers quelques modèles théoriques;
- la notion de préférence nationale et d'ethnocentrisme du consommateur ;
- la conclusion sur les conditions de l'influence du pays d'origine 


CHAPITRE I - LES DIFFERENTES RECHERCHES SUR L'EFFET "PAYS D'ORIGINE" EN MARKETING


De nombreuses études sur l'influence du pays d'origine du bien sur les évaluations des consommateurs ont été menées ces quarante dernières années. Usunier (2002)  a recensé environ 300 articles académiques et plus de 1 000 contributions via des thèses et recherches présentées lors de conférences.
Les premiers travaux sur ce sujet ont été écrits à la fin des années soixante. Les précurseurs, Schooler et Wildt, ont mené en 1968 une expérimentation sur l'effet du pays d'origine. Ils proposèrent à des sujets d'évaluer deux verres absolument identiques, l'un portant la mention "made in USA", l'autre "made in Japan". Le verre "made in USA" ayant été mieux évalué que l'autre, les auteurs en ont conclu que les évaluations des sujets interrogés ont été influencées par des préjugés à l'égard des pays de fabrication des objets. Le pays d'origine du produit influencerait donc les évaluations des consommateurs.

Cependant, selon Usunier (2002), le fait de soumettre aux personnes interrogées le seul pays d'origine comme critère d'évaluation de la qualité des produits a pour effet d'en exagérer l'importance. En effet, l'expérimentation de Schooler et Wildt (1968) a aussi montré que l'effet prix peut amener le consommateur à choisir un produit qu'il évalue le plus mal, le consommateur étant également souvent obligé d'arbitrer en fonction du prix qu'il souhaite ou peut dépenser pour un produit.
Dans les années 70, d’autres études voient le jour comme celles de Nagashima (1970, 1977). Les travaux de cet auteur se sont focalisés sur la problématique du pays d'origine et y ont ajouté différents autres attributs afin d'éviter la surreprésentation de l'effet du pays d'origine sur les évaluations des consommateurs.
Depuis les années 70, le monde économique a considérablement évolué avec les effets de la délocalisation de la production des firmes. La notion de pays d'origine s'est considérablement brouillée dans l'esprit des consommateurs. En effet, une firme multinationale peut vendre sous une même marque des produits qui ont des provenances nationales différentes.
A partir des années 80, des études ont commencé à vouloir dissocier l'effet marque et son pays d'origine, de l'effet du pays de production. Les précurseurs en la matière ont été Johansson et Nebalzahl (1986) qui ont étudié les effets d'un changement du lieu de production d'une voiture (Chevrolet, Buick, Honda ou Mazda) vers plusieurs pays (Allemagne de l'Ouest, Mexique, Corée du Sud et Philippines) dans la perception des consommateurs américains. Ils en ont conclu que "l'effet du pays de production est plus fort sur les évaluations du consommateur que le nom de la marque". Cependant, d'autres chercheurs, Eroglu et Machleit (1989) ont eux conclu que les consommateurs accordent une importance équivalente à la l'effet marque et à l'effet pays de production.
Depuis 1995, les études sur le sujet du pays d'origine ont pris un nouveau tournant et ont intégré plusieurs composantes distinctes à interactions complexes :
ü  l'image d'origine (OC Origin Country pour Nebenzahl et al., 1997) un pays que les consommateurs associent avec un produit ou une marque, indépendamment du lieu de fabrication ;
ü  le pays de fabrication (MC Made-in Country pour Nebenzahl et al., 1997, ou COM Country-of-Manufacture pour Samlee, 1994) celui dont le nom apparaît sur l'étiquette du "made in" (le pays de la production finale du bien) ;
ü  le pays de conception (DCI, Designed-in Country pour Nebenzahl et al., 1997) celui où l'essentiel du produit fini est imaginé et conçu.

Ainsi, Peterson et Jolibert (1995) ont mené une recherche destinée à estimer l'influence de ces composantes par une méta analyse de 52 études concernant l'influence du pays d'origine. Ils ont tout d'abord observé que d'après les études uni-attribut fondées sur la seule origine nationale et centrées souvent sur le pays de fabrication, l'effet moyen de l'origine du bien est de 0,30 sur la perception de la qualité et de la fiabilité. Cela signifie que le pays d’origine explique 30 % de la variance de la qualité perçue. Lorsqu'ils se sont ensuite intéressés à des études qui intègrent des modèles multi-attributs (marque, prix, réputation du distributeur...), ils se sont aperçus que l'effet de l'origine du produit sur la perception de la qualité et de performance baisse à 0,16 soit quasiment de moitié. Ils ont également observé que l'effet moyen de l'origine du bien pour les intentions d'achat qui est de 0,19 d'après les études uni-attribut, s'effondre à 0,03 quand on considère l'origine nationale en combinaison avec d'autres attributs.

Une autre méta-analyse d'Ulgado et Lee (1998) a montré quant à elle que les consommateurs américains et coréens n'utilisent pas l'information du pays d'origine du produit mais plutôt l'information liée aux attributs du produit pour déterminer leurs intentions d'achats.
Pour finir, une méta-analyse de Verlegh et Steenkamp (1999) a confirmé que l'influence du pays d'origine sur le choix des consommateurs est très faible alors que cette influence est plus prononcée sur les évaluations liées à la qualité.

En définitive, l'internationalisation de la production de biens, les sources de productions diversifiées et combinées ont rendu difficile la connaissance des consommateurs sur la véritable origine nationale des produits. Ceci n'était pas vrai il y a une trentaine d'années. Il est dès lors clair qu'il convient pour cette étude de se concentrer sur les recherches multi-attributs les plus récentes qui ont été faites sur l'effet pays d'origine.

CHAPITRE II - LE PROCESSUS D'INFLUENCE DU PAYS D’ORIGINE

Section 1 : Les consommateurs ne connaissent généralement pas le pays d'origine des produits qu'ils achètent

Dans une étude exploratoire, Usunier (2002) a constaté que seulement 35% des consommateurs interrogés connait le pays d'origine du dernier produit hi-fi ou électroménager qu'il ou elle a acheté et les résultats montrent qu'il n'y a aucune différence en fonction du sexe ou de l'âge.
Une autre étude menée par Liefeld (2004) aux Etats Unis a montré que sur 1 248 acheteurs interrogés, seulement 91 personnes (soit 6,5%) connaissent le pays d'origine de leurs achats. Pour ces consommateurs ultra minoritaires, la connaissance du pays d'origine est fortement corrélée à l'importance qu'ils y accordent ainsi qu'à leur connaissance de la marque.
Ces deux études montrent donc qu'une grande majorité des consommateurs ne connait pas le pays d'origine des produits achetés et l'absence croissante de l'information sur le pays d'origine des produits accentue ce phénomène. Les marques se substituent de plus en plus au label "made in" comme élément d'information. Or, il est clair que ce phénomène ne peut que brouiller l'évaluation ou la perception des consommateurs sur l'origine des produits, une marque pouvant produire dans plusieurs pays différents.
Les consommateurs sont généralement peu informés de l'origine nationale des produits qui n'est d’ailleurs pas toujours indiquée. Même si cette information d'origine existe, ils ne sont pas toujours motivés pour la rechercher. Pourtant, l'origine d'un produit n'est pas une information anodine, elle influence souvent la perception de la qualité et de son image bas ou haut de gamme. L'expérience initiale des années 60 sur les verres en tout point identiques présentés à un échantillon de consommateurs a montré que ces verres étaient bien perçus de manière différente selon qu'ils étaient supposés venir du Japon ou des Etats Unis.
Section 2 : L'importance du critère pays d'origine n'est pas déterminante dans les actes d'achat pour une majorité de consommateurs

Dans l'étude exploratoire d'Usunier (2002), 36% des consommateurs ont considéré le pays de fabrication comme important pour un achat lorsqu'on leur a posé la question suivante : "lors de vos achats, le pays de fabrication était-il un critère (de très important à très peu important)?".
Pourtant, il est intéressant de noter que pour cette même étude, lorsque les répondants indiquent de manière spontanée leurs critères d'achat pour un produit ils ne citent que dans 4% des cas le pays de fabrication, les critères prédominants étant le prix (pour 82%), la qualité (pour 74%), la marque (pour 33%) et enfin le design (pour 30%).
Ce résultat confirme une étude de Dawar et Parker (1994) qui a permis de déterminer quatre attributs majeurs en tant que signaux de qualité à travers différents pays industrialisés. Ces quatre attributs sont dans l'ordre : la marque, le prix, l'apparence physique et la réputation du distributeur.
L'étude de Liefeld (2004) montre enfin que seul 1,7% des acheteurs interrogés considèrent comme important le pays d'origine du produit lorsqu'ils ont un choix à faire. Cette étude montre également que sur les cinq attributs importants pour le choix d'un produit, les propriétés intrinsèques du produit (c'est à dire la couleur, le design, l'apparence...) arrivent en première position, suivi du prix et de la marque. Ces conclusions se rapprochent de l'étude de  Dawar et Parker (1994). En définitive, le pays d'origine ne serait pas un critère déterminant pour faire un choix entre plusieurs alternatives. En fait, l'évaluation de l'attribut pays d'origine ne détermine pas l'acte d'achat, mais plutôt l'intention d'achat, ce qui n'est pas toujours suivi d'effet.




CHAPITRE III - PREFERENCE NATIONALE ET ETHNOCENTRISME DES CONSOMMATEURS


Section 1 : La proportion des consommateurs sensibles à l’origine des produits est faible néanmoins, ils expriment un degré de préférence nationale et un ethnocentrisme réel

Pour Usunier (2002), l'effectif des consommateurs qui pourraient constituer une cible éventuelle pour une campagne du type "achetez français" est réduite puisque seuls 16% des répondants de son étude connaissent le pays de fabrication ainsi que la marque et ont une préférence pour acheter un produit français.
Johansson et Nebenzahl (1987), Ettenson et al. (1988) ont mené deux études à la suite de campagnes voulant promouvoir des produits américains (buy American, crafted with pride in the USA) qui ont montré que ces types de campagnes n'ont pas impacté de manière significative les ventes des sociétés produisant aux Etats Unis.
L'étude exploratoire d'Usunier (2002) indique une relative indifférence à la préférence nationale (seulement 35% déclarent préférer des produits nationaux). Cette indifférence est d'autant plus importante que les consommateurs ont fait des séjours à l'étranger, qu'ils ont un niveau d'instruction plus élevé et qu'ils ont un niveau de revenu élevé. A l'opposé, le sexe semble être pertinent pour expliquer la préférence nationale. En effet, les hommes marquent une préférence plus forte que les femmes. L'âge est également significatif et va dans le sens d'une augmentation de la préférence nationale au fur et à mesure que les personnes vieillissent, mais il s'agit peut être simplement d'un phénomène de génération.
La proportion des consommateurs sensibles à l'origine des produits est donc réduite pourtant de nombreuses études sur l'ethnocentrisme des consommateurs révèlent un certain nombre d'éléments intéressants. Les travaux de Shimp et Sharma (1987), Netemeyer, Durvasula et Lichtenstein (1991), Kaynak et Kara (2000), Keillor et al. (2001), et  Suh et Smith (2008), en sont de bonnes illustrations.
Tout d’abord, Shimp et Sharma (1987) définissent l'ethnocentrisme du consommateur comme une tendance à exhiber une préférence nationale ou une attitude favorable envers les produits originaires ou associés à sa culture ou à son pays comparés aux produits fabriqués à l'étranger. L'ethnocentrisme du consommateur peut résulter de croyances comme quoi il est inapproprié et même immoral d'acheter des produits fabriqués dans d'autres pays plutôt que des produits fabriqués dans son propre pays. Acheter des produits importés dégraderait l'économie nationale et serait la cause de destruction d'emplois.
Shimp et Sharma (1987) ont en outre développé un instrument nommé CETSCALE (Consumer Ethnocentric Tendency Scale)  pour mesurer les tendances ethnocentriques des consommateurs dans l'achat de produits étrangers par rapport à l'achat de produits américains.  En effet, Shimp et Sharma (1987) trouvaient que le marketing ne s'était pas suffisamment penché sur le concept d'ethnocentrisme.

CETSCALE est une échelle de mesure composée de 17 items, les réponses obtenues sont évaluées selon une échelle de notation de type Likert en sept points (exemple tout à fait d'accord = 7; pas du tout d'accord = 1), la somme des scores sur tous les items peut varier entre 17 et 119. Plus on est proche de la valeur maximale, plus le consommateur est ethnocentrique. La version de Shimp et Sharma (1987) comporte les questions suivantes (traduction en annexe II) :
1.      American people should always buy American-made products instead of imports.
2.      Only those products that are unavailable in the U.S. should be imported.
3.      Buy American-made products. Keep America working.
4.      American products, first, last, and foremost.
5.      Purchasing foreign-made products is un-American.
6.      It is not right to purchase foreign products, because it puts Americans out of jobs.
7.      A real American should always buy American-made products.
8.      We should purchase products manufactured in America instead of letting other countries get rich off us.
9.      It is always best to purchase American products.
10.  There should be very little trading or purchasing of goods from other countries unless out of necessity.
11.  Americans should not buy foreign products, because this hurts American business and causes unemployment.
12.  Curbs should be put on all imports.
13.  It may cost me in the long-run but I prefer to support American products.
14.  Foreigners should not be allowed to put their products on our markets.
15.  Foreign products should be taxed heavily to reduce their entry into the U.S.
16.  We should buy from foreign countries only those products that we cannot obtain within our own country.
17.  American consumers who purchase products made in other countries are responsible for putting their fellow Americans out of work.
Grace à cette échelle, Shimp et Sharma (1987) ont pu étudier le niveau d’ethnocentrisme dans différentes régions des Etats-Unis, plus ou moins atteintes par la concurrence de produits étrangers : Detroit, Denver, Los Angeles, Carolines du nord et du Sud. Ils en ont conclu que l'ethnocentrisme du consommateur est d’autant plus fort que la menace est perçue par des individus dont le niveau et la qualité de vie sont mis en cause directement par la concurrence étrangère.

Cette échelle a été testée ensuite dans plusieurs pays dont notamment la France. Netemeyer, Durvasula et Lichtenstein (1991) ont testé l'échelle de mesure CETSCALE dans quatre pays pour valider son utilisation (USA, France, Japon et Allemagne). La structure des résultats empiriques est similaire dans tous les pays : les consommateurs pensent qu'il est important d'acheter des produits nationaux, développent une attitude négative envers l'achat de produits étrangers, et ont des croyances générales plutôt négatives sur la qualité des produits étrangers.
Pour compléter le propos, une étude de Keillor et al. (2001) a conclu à une identité nationale et un ethnocentrisme du consommateur significativement bien plus élevés en France qu'aux Etats Unis d'Amérique. L'étude a montré également que le concept d'identité nationale progresse avec l'âge tout comme l'ethnocentricité du consommateur.
Enfin, dans une étude concernant la globalisation et le pays d'origine, Suh et Smith (2008) mentionnent une publication de Kaynak et Kara (2000). Cette publication concernant la perception des consommateurs envers des produits d'origine étrangère a conduit ses auteurs à conclure que le pays d'origine d'un produit peut être une puissante variable d'image qui peut être utilisée comme un véritable avantage compétitif par un pays ou une entreprise. Ils ajoutent néanmoins une condition : l'image du pays d'origine doit être perçue comme le pays de fabrication ou il doit être associé avec les meilleurs standards techniques de qualité et d'innovation.

Section 2 : Les consommateurs sont prêts à payer plus cher pour acheter un produit provenant d'un pays d'origine ayant une image favorable

Une étude récente de Koschate-Fischern, Diamentopoulos et Oldenkotte (2012) met en exergue le fait que les consommateurs seraient prêts à payer d'avantage pour un produit provenant d'un pays ayant une image  favorable.
Les études expérimentales qui ont été menées par ces chercheurs montrent que les consommateurs sont prêts à payer des prix plus élevés pour des produits de marque ayant été fabriqués dans un pays ayant une image favorable que pour des produits provenant d'un pays ayant une image moins favorable (par exemple, pour les produits en provenance de France plutôt que d'Autriche ou des produits en provenance des États-Unis plutôt que la Corée du Sud).
Koschate-Fischern, Diamentopoulos et Oldenkotte (2012) conseillent aux entreprises de communiquer sur le pays de provenance du produit afin d'expliquer la différenciation par le prix.  En effet, si l'entreprise bénéficie d'un environnement favorable en termes d'image du pays de production, elle a tout intérêt à souligner le pays de production dans sa stratégie de communication (publicité ou mention sur  l'emballage). Avec de telles mesures, les consommateurs devraient noter et traiter le pays d'origine comme un signal d'information, qui renforce leur acceptation à payer d'avantage.
Enfin, ces chercheurs soulignent que les consommateurs exigent de plus en plus  la prise en compte par les entreprises de l'environnement et des questions éthiques. Le développement durable est un sujet majeur pour les entreprises car en effet, la provenance d'un produit impacte les dépenses de logistique, les conditions d'emploi ou de production.
Ils donnent l'exemple de ce qui se passe en Allemagne où les consommateurs ont de plus en plus tendance à acheter des produits locaux et régionaux (image positive des collectivités locales, régionales considérées comme des zones en lesquelles les consommateurs peuvent avoir confiance, et non recours aux transports de longues distances). A l'inverse, certains pays asiatiques, par exemple, permettent une production à bas coûts, mais avec une production moins éthique et respectueuse de l'environnement ce qui pèse sur la réputation de ces pays.
Ainsi, la provenance d'un produit a le potentiel pour rassurer les consommateurs et peut l'encourager à dépenser plus pour obtenir un produit dans lequel il aura plus confiance. En d'autres termes, le pays d'origine peut représenter un argument de vente unique pour que les consommateurs soient prêts à payer.



CHAPITRE IV - CONCLUSION : LES CONDITIONS DE L'INFLUENCE DU PAYS D'ORIGINE


En conclusion de cette revue de littérature, il est important de mentionner les cinq conditions qui entrent en jeu dans l'influence de l'information pays d'origine sur l'évaluation des consommateurs recensées par Usunier (2002).
Tout d'abord, il faut que le consommateur considère l'information du pays d'origine comme pertinente dans son choix,  et cette pertinence peut varier suivant la catégorie du produit.
Il faut également que le consommateur soit suffisamment motivé par cette information pour consacrer du temps à la rechercher et comparer les origines alternatives. Ceci est d'autant plus le cas que l'achat est impliquant et surtout que le risque perçu est élevé.
La motivation du consommateur dépend également en partie de la préférence des produits nationaux liés au patriotisme ou à l'ethnocentrisme du consommateur, de la préférence pour les produits étrangers, ou encore de la préférence du consommateur pour des origines précises auxquelles il associe favorablement certains attributs. Les consommateurs qui ne se retrouvent dans aucun des cas précédents seront indifférents à l'information.
Un autre élément important est que le consommateur doit estimer cet élément d'information comme prioritaire par rapport à d'autres comme par exemple le prix, la réputation du magasin. En fait, le critère pays d'origine est souvent utilisé en combinaison avec d'autres critères de choix.
Pour finir, le consommateur doit pouvoir trouver facilement l'information sur le produit ou sur un document l'accompagnant ou en demandant à un vendeur. Cette condition est essentielle.

lundi 13 mai 2013

L'ENGOUEMENT MEDIATIQUE POUR LE "MADE IN FRANCE"

L'engouement médiatique pour le "Made in France" est bien réel, la crise économique, les délocalisations, la notion de désindustrialisation de la France sont très présents dans les médias depuis quelques années.

Section 1 : Petit historique de l'utilisation du "Made In France" en politique

L'utilisation du "Made in France" en politique n'est pas nouvelle, voici un bref aperçu de son utilisation depuis les années 80.

Dans les années 80 le Parti Communiste utilise le slogan "Produisons Français" et dans la même période le Front National reprend la même thématique avec une ligne politique plus dure : « Produisons Français, avec des Français ».
En 1993, les Chambres de Commerce et d'Industrie lancent un spot publicitaire et une campagne d'affichage : "Nos emplettes sont nos emplois".


En 2005 c'est Dominique de Villepin qui reprend la thématique du patriotisme économique lors d'une conférence de presse suite à des rumeurs d'OPA hostile de PepsiCo sur Danone : " Je souhaite rassembler toutes nos énergies autour d’un véritable patriotisme économique. Je sais que cela ne fait pas partie du langage habituel mais il s’agit bien de (…) défendre la France et ce qui est français."

Désigné comme un levier contre la crise, le "Made in France" refait surface et devient un thème important de la dernière campagne présidentielle de 2012.
François Bayrou en fait une stratégie de campagne, François Hollande reparle du patriotisme industriel, Marine Le Pen promet l’élaboration d’une loi « achetons français », et Nicolas Sarkozy, qui avait déjà fait de l’identité nationale un thème de campagne en 2007 prône que « La France c’est une bonne marque », et milite pour une consommation mais également une production de produits français.
Ce phénomène ne s'arrêtera d'ailleurs pas après la fin des élections puisqu'en octobre 2012 le Parisien Magasine sort un numéro avec une photo d'Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, sur un fond bleu, blanc, rouge avec comme titre "le "Made in France", il y croit, on l'a testé". Les ventes de marinières d'Armor Lux auraient significativement augmenté suite à cet article.


Section 2 : De plus en plus de sites internet autour de la thématique de la production
française
De nombreux sites ont été créés sur internet autour de la thématique du "Made in France".
Ces sites intègrent des annuaires répertoriant les produits, marques et entreprises de fabrication française, ou sont directement des sites d'achats en ligne.
Les principaux sites sont :
Sites d'informations et annuaires :
http://www.hexaconso.fr/ : "tout savoir sur le Made in France" ;
http://www.madine-france.com/fr/ : "premier annuaire de la fabrication française" ;
http://www.lafabriquehexagonale.com/ : " Les produits fabriqués en France, les entreprises
qui produisent localement" ;
http://www.100pour100-madeinfrance.fr : "acheter français devient si simple" ;
http://achetons-francais.net/ : "Le label de la consommation enracinée" ;
http://www.lemadeinfrance.net/ : "retrouvez tous les produits de fabrication 100%
française".
Sites marchands :
http://www.france-avenue.fr/ : "création, qualité et savoir faire" ;
http://www.alittlemarket.com/ ;
http://www.acheter-francais.org/ :"la référence du Made in France".

L'utilisation de l'application Google Trends sur internet montre que l’expression « Made in France » est de plus en plus recherchée par les internautes. En effet, on constate une nette augmentation de la requête depuis fin 2011.

Section 3 : De nombreux articles de presse et études paraissent chaque semaine

Un nombre importants d'articles de presse écrite, de reportages télévisés et de sondages sont réalisés chaque semaine sur le thème du "Made in France", des délocalisations et de la sauvegarde des emplois. Même en pleine période de fêtes de fin d'année, des articles et des sondages ont été faits pour mettre en avant ce qui serait le nouveau comportement des français  favoriser les produits faits en France pour les cadeaux de Noël.
En effet, selon une étude réalisée par OpinionWay pour Alittlemarket en décembre 2012, une majorité de français (soit 55%) ont opté pour des cadeaux "Made in France" pour leurs achats de Noël.





mardi 7 mai 2013

LES REGLES RELATIVES AU MARQUAGE DES PRODUITS


Section 1 : La législation française :

La consultation du site http://www.industrie.gouv.fr donne les règles relatives au marquage des produits en France. Il n'existe pas en France d'obligation légale ou réglementaire imposant le marquage d'origine des produits, à l'exception de quelques produits tels que les produits agricoles et alimentaires (les fruits et légumes par exemple). Le marquage d'origine est donc, sauf pour les produits cités ci-dessus, facultatif et volontaire. Il est effectué sous la seule responsabilité du fabricant ou de l'importateur.
L'appellation d'origine n'est donc pas obligatoire au plan national : chaque firme reste libre d'indiquer l'origine de ses produits si elle le souhaite. Elle est simplement contrainte par la législation qui réprime les fausses indications d'origine ainsi que par le règlement des appellations d'origine contrôlée pour un nombre très limité de produits (vins et fromages essentiellement).

Section 2 : La règlementation du commerce international

Les règles d'origine sont des éléments très anciens du commerce international et avaient pour but l'application des droits de douane (aujourd'hui ils ne représentent plus que 3% après négociations commerciales multilatérales alors qu'il y a 50 ans les droits de douane étaient très élevés et représentaient 40 à 50% de taxes). Les règles d'origine servent aussi à élaborer les statistiques commerciales internationales et ainsi mettre en oeuvre différentes mesures commerciales (anti-dumping, clauses de sauvegarde, accords préférentiels, zones de libres échanges...).

Depuis les accords d'Uruguay en 1994 et la création de l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce - 1995) il a été décidé d'une harmonisation des règles d'origine au plan mondial via un Comité des règles d'origine qui peine à trouver des solutions globalement acceptées. Il n'existe pas à ce jour de cadre juridique universel pour la détermination et le marquage de l'origine des produits, chaque pays fait ce qu'il veut et certains pays sont plus permissifs que d'autres.
En fait, l'OMC a toujours fait en sorte que les règles d'origine ne soient pas utilisées comme instrument de politique commerciale. En effet, les pays dits à bas coûts (ou en voie d'industrialisation) ont généralement une image faible en terme de qualité. Les conséquences sont que les labels d'origine sur les produits sont de moins en moins clairement indiqués. Les firmes multinationales ont tout intérêt à ne pas informer les consommateurs sur l'origine des biens et les autorités du commerce international les considèrent comme une barrière à la participation des pays émergents aux échanges internationaux.


Selon Usunier (2002) : "l'ambiguïté de l'information pays d'origine dans la règlementation globale du commerce international est croissante" et on peut ajouter qu'elle est voulue par l'OMC. L'origine du produit serait un élément d'information avantageant les pays industrialisés et créerait un désavantage compétitif pour les pays en voie d'industrialisation dont l'image d'origine est en moyenne peu favorable.

Les conséquences sont importantes non seulement pour les consommateurs mais aussi pour les producteurs qui voudraient mettre en avant leur production nationale. En effet, le consommateur a de moins en moins d'information sur l'origine des produits, surtout quand elle est défavorable. Plus grave, des labels peu informatifs, compliqués voire fantaisistes ont fait leur apparition. C'est le cas de labels tels que "made in Europe", "made in nowhere" "assembled in ...", "from ...", "transformé en France"...

De nos jours l'origine nationale du produit est beaucoup moins disponible pour les consommateurs qu'il y a 30 ou 40 ans. Il existe une sorte de stratégie de brouillage de la provenance, les entreprises préfèrent mettre de plus en plus en avant la marque d'un produit que le pays dans lequel il a été conçu. Ceci n'incite pas le consommateur à y être attentif.


Section 3 : Les différentes mentions utilisées en France et leurs définitions


Les consommateurs français doivent faire face à différentes mentions utilisées par les industriels et généralement, plus les mentions deviennent floues et plus la part de production française dans le produit se réduit. Il en existe cinq principales :

 fabriqué en France ou "Made in France" : cette mention renvoie en principe aux produits fabriqués en France. Un produit est français si au moins 45% de sa valeur ajoutée a été produite sur le sol national. Pour déterminer le pays d'origine, les douanes et la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) se fondent sur l'article 24 du Code des douanes communautaires qui s'intéresse à la dernière transformation ou ouvraison substantielle ayant abouti à la fabrication d'un produit nouveau ou représentant un stade de fabrication important ;

 conçu en France ou "designed in France" : cette mention veut dire que le produit a été imaginé, conçu, pensé, dessiné, mis au point en France mais que la production est faite à l'étranger (par exemple un voiture conçue en France mais fabriquée au Maroc) ; 

 assemblé en France : cela s'applique aux produits dont la majeure partie des composants provient de pays étrangers (par exemple un magnétoscope dont tous les composants proviennent de pays étrangers et dont les opérations d'assemblage ont été faites en France) ;

 conditionné en France : cela concerne principalement l'emballage fait en France de produits finis fabriqués à l'étranger (par exemple des brosses à dents qui sont fabriquées à l'étranger et mis sous emballage pour la vente en France) ;

 transformé en France : cette mention concerne surtout des produits alimentaires étrangers qui arrivent à l'état brut et qui sont transformés, cuisinés ou élaborés en France (par exemple des foies gras d'oie élevées et abattues en Hongrie, préparés, cuits et conditionnés en France).

Section 4 : Vers de nouveaux labels en France ?


Le label "Origine France Garantie" a été présenté officiellement à l'Assemblée nationale le 19 mai 2011. Il a pour objectif, d’une part, de donner aux consommateurs une information claire sur l’origine d’un produit et, d’autre part, de permettre aux entreprises qui font cette démarche de certification, de valoriser leur production.
Pour obtenir ce label, le produit fabriqué doit respecter les deux critères suivants : le lieu où le produit prend ses caractéristiques essentielles est situé en France et 50% au moins du prix de revient unitaire est acquis en France. L'entreprise candidate au label doit respecter un cahier des charges, présenté sur le site de l'Association Pro France, chargée de promouvoir la marque France. Le site détaille les modalités d’obtention du label et propose une série de questions fréquemment posées. Le Bureau Veritas Certification a été désigné par l'association Pro France pour assurer la gestion technique et opérationnelle. Toyota a obtenu ce label pour sa Toyota Yaris ainsi que Atoll, Brandt, Faure, De Dietrich et Rossignol pour certains de leurs produits.




lundi 6 mai 2013


QUELQUES PRATIQUES D'ENTREPRISES (5ème partie)

Dans la rédaction de mon mémoire sur le Made in France  je me suis intéressée à d'autres secteurs d'activité pour illustrer les pratiques des entreprises françaises en matière de communication sur le "Made in France".



Ces marques étrangères qui communiquent sur leur production française : 
l'exemple de COCA-COLA

Un phénomène relativement récent a vu le jour en matière de communication sur le pays de l'origine de production : des marques étrangères communiquent en France sur le lieu de production français des produits qu'elles proposent aux consommateurs.
C'est le cas notamment de la TOYOTA YARIS, mais plus étonnant, le cas du mastodonte Coca-Cola, figure emblématique de l'Amérique toute puissante dans l'esprit des consommateurs et très longtemps porteur du rêve américain.
Coca-Cola se compose de plusieurs entreprises. The Coca-Cola Company est la société historique fondée à Atlanta qui a développé et qui promeut le Coca-Cola et ses autres sodas.

Elle travaille avec de nombreux embouteilleurs qui sont chargés de produire et de distribuer ses boissons. Coca-Cola Entreprise est la filiale française qui gère la production des boissons et assure la commercialisation auprès des distributeurs.

La promotion d’un Coca-Cola "Made in France" s’inscrit dans une stratégie de communication institutionnelle et met en avant l’embouteilleur français. 
Cette campagne publicitaire remonte à l’année 2009. Elle a été déclinée en presse écrite : Presse Quotidienne Nationale (Le Figaro, Le Monde, Libération, Les Echos, La Tribune, l’Equipe), Presse Quotidienne Régionale (proche des lieux d’implantation des sites de production ou de direction régionale comme La Provence, La Voix du Nord, La Dépêche du Midi, l’Est Républicain, Le Progrès, Ouest France, le Parisien ou Direct Matin).
Plusieurs affiches ont été faites mettant en scène une proposition "Made in France avec fierté" et des propositions plus régionales "Made in Castanet-Tolosan avec fierté", déclinées pour la Provence, l'Ile de France et Dunkerque.



Ce type de campagne permet à la marque de communiquer sur des faits très objectifs. Elle cite des chiffres surprenants : Coca-Cola Entreprise favorise l’emploi en France et produit une grande partie de ses matières premières dans le pays. « 95% des boissons commercialisées en France par Coca-Cola Entreprise sont fabriquées en France (…) à partir de 80% de matière première française ».En évoquant « Made in France. Avec fierté. » ou plus spécifiquement « Made in Castanet-Tolosan. Avec fierté. », Coca-Cola Entreprise veut frapper les esprits et cette publicité est vraiment puissante pour celui qui prend la peine de la lire. Elle montre non seulement des hommes et des femmes français fiers de travailler pour Coca-Cola, mais elle indique aussi que les matières premières sont d'origine française ou encore que des millions d'euros d'investissements sont effectués par l'entreprise sur le sol français.

Plus surprenant encore, Coca-Cola a fait en 2011 une campagne pour contre-attaquer le "Breizh Cola" qui lui volait des parts de marché dans le grand ouest. La direction de Coca-Cola en Bretagne a obtenu de la firme d’Atlanta le droit de faire une entorse à la charte graphique de la marque pour produire une publicité Coca-Cola aux couleurs et aux codes de la Bretagne ce qui fut une première. Coca-Cola a donc affiché dès le début de l'été 2011 sa nouvelle identité dans les supermarchés, les crêperies, les cafés les panneaux d’affichage des villes bretonnes et la Bretagne est devenue la seule région au Monde où Coca-Cola propose
une identité visuelle régionale particulière.


Le tout dernier communiqué de presse à ce jour de Coca-Cola qui date du 12 décembre dernier réaffirme l'engagement de Coca-Cola de faire du "Made in France" une priorité ce qui montre bien que depuis 2009 Coca-Cola poursuit la même stratégie de communication sur le sujet.